Tout d’abord, qu’est ce que le vermicompostage ?
Le vermicompostage (appelé également lombricompostage) tout comme le compostage, est un processus contrôlé de décomposition de la matière organique qui a pour objectif final de produire un amendement permettant d’augmenter la fertilité du sol (Doan et al., 2015).
La différence majeure avec le compostage est l’apport de vers de terre en amont du processus de décomposition pour aider et accélérer le processus de stabilisation des déchets (Lim et al., 2016). Les vers de terre utilisés sont généralement des épigés (qui vivent naturellement en surface dans la litière du sol) car ils se reproduisent vite et consomment une grande quantité de matière organique (Blouin et al., 2013 ; Bouché, 2014).
En effet, Les vers de terre épigés ingèrent quotidiennement environ 75 % de leur poids corporel, soit 0,15 g de matière pour un individu de 0,2 g. Leur population peut quant à elle doubler en 60 jours ! (Chaoui, 2010)
A Lyon, l’associationEisenia développe la technique du lombricompostage. Au-delà des intérêts (écologiques et économiques) de cette méthode, c’est aussi une ouverture vers d’autres sujets liés (traitement des déchets et biodéchet, vie des sols, baisses des émissions de GES, agriculture et gestion d’espace écologique, accès à une nourriture de qualité…) qui permet à l’association d’imaginer des projets variés comme l’installation de composteurs collectifs, la réalisation d’animations scolaires mais aussi des formations professionnalisantes à destination des collectivités, des métiers agricoles ou des paysagistes.
Pourquoi une thèse sur le sujet ?
Le lombricompostage est une technique émergente et de nombreuses études restent encore à effectuer pour parfaire son utilisation. De plus, le lombricompostage individuel ayant ses limites pratiques (place limitée en appartement et investissement coûteux pour des foyers modestes), son application en plateforme ou en pied d’immeuble est une alternative qui permettrait de centraliser la matière afin de limiter les transports. En effet, la valorisation des biodéchets (composés à 80% d’eau) le plus localement possible permet ainsi de transporter le produit transformé (moins lourd) pour l’épandage futur.
C’est à ce double niveau que se positionne le projet de recherche : la valorisation des biodéchets urbains est-elle adaptée pour produire des amendements de qualité pour l’essor d’une agriculture biologique (norme NFU) et l’émergence de nouvelles pratiques agroécologiques ?
L’objectif est d’apporter des solutions concrètes pour pouvoir valoriser les biodéchets urbains triés à la source et dans ce cadre d’évaluer l’impact du lombricompost sur les sols. L’originalité de cette étude est qu’elle aborde, en plus des aspects agronomiques et physico-chimiques classiques, l’impact de l’amendement sur les communautés d’invertébrés des sols qui sont reconnus pour avoir un rôle fondamental sur la fertilité (Lavelle et al., 2006). En effet la redynamisation biologique d’un sol est essentielle pour son bon fonctionnement (Gobat et al., 2010) et le lombricompost, par son activité biologique supérieure aux autres amendements (Adhikary, 2012), représente une opportunité pour la transition écologique vers un développement durable.
Afin d’évaluer de manière qualitative et quantitative l’effet du lombricompost sur la fertilité des sols, leur biodiversité et le rendement en Agriculture Biologique (AB), deux axes principaux sont définis :
- l’étude de la qualité des lombricomposts comme amendements organiques en laboratoire
- l’étude de ces composts appliqués en plein champ sur la fertilité et la biodiversité du sol.
Les travaux en condition de plein champ permettront en outre de comparer les effets des différents amendements sur la production en quantité et qualité de biomasse agricole.
Pour cela, des essais ont été lancés dans deux fermes en agriculture biologique : Le GAEC du Murier à Saint-Joseph et la SCEA Champ Leclerc à Genay.
Les effets du lombricompost y seront comparés (Indice de stabilité de la matière organique, C/N et azote organique et minéral) à ceux de composts « classiques » et de digestats de méthaniseur également issus des biodéchets urbains.
Afin de travailler à l’échelle du système de culture (échelle décisionnelle des agriculteurs), cet apport d’amendements sera également combiné à d’autres pratiques agroécologiques comme la réduction du travail du sol ou l’utilisation de couverts végétaux afin de déterminer les pratiques les plus efficientes en système de Grandes Cultures AB.
Modalités des essais mis en place :
Les résultats de ces expérimentations ne sont pas encore visibles mais cette thèse ouvre d’ores et déjà de belles perspectives. En effet, le développement de la pratique du lombricompostage pour fertiliser des terres agricoles permettrait à la fois de valoriser en compost normé les biodéchets issus des ménages, que la Métropole va devoir collecter à partir de 2021, et d’améliorer la santé des sols agricoles.
Une étude va d’ailleurs être lancée en 2021 pour étudier le potentiel que pourrait représenter pour l’agriculture du territoire, un compost normé issu du traitement des biodéchets ménagers triés à la source sur la Métropole. Affaire à suivre...