Et si on parlait du maraîchage sur sol vivant ?

Un article estival pour présenter les principes de bases et quelques points techniques du
maraîchage sur sol vivant ou MSV, bonne lecture !

Maraîchage sur sol vivant (MSV) : qu’est ce que c’est ?

Un sol fertile est un sol vivant.

Le maraîchage sur sol vivant ou MSV est né d’un groupe de maraîchers voulant révolutionner les pratiques actuelles de la production de légumes en créant de nouveaux systèmes inspirés de la nature.

Si on observe la nature, les végétaux des prairies ou des forêts poussent sans intervention humaine, c’est-à-dire sans que le sol ne soit ni travaillé, ni fertilisé, ni irrigué. L’idée du maraîchage sur sol vivant est de reconstituer dans les parcelles agricoles le cycle naturel de la fertilité des sols par des itinéraires techniques spécifiques : arrêt du travail du sol et apports de matière organique au sol (MO).

La base du maraîchage sur sol vivant est donc d’« offrir le gîte et le couvert à la vie du sol » afin d’établir avec elle un véritable partenariat et bénéficier ainsi de tous les services écosystémiques qui en découlent. Ne pas perturber le sol et l’enrichir avec des MO favorise sa stabilité structurale et donc augmente sa capacité à retenir l’eau accessible par les plantes. De plus, une vie biologique active dans un sol permet un bon recyclage de la MO et fournit à la plante les nutriments nécessaires à sa croissance. Le maraîchage sur sol vivant est à l’origine d’une forte biodiversité dans le sol et donc d’un meilleur contrôle naturel des bioagresseurs des plantes. Le sol est un écosystème à part entière et les pratiques du MSV contribuent à maintenir ses équilibres naturels et sa fertilité à la fois physique, chimique et biologique. Les légumes sont produits dans des conditions favorables à leur croissance et à leur qualité sans polluer ni consommer de grandes quantités d’énergie.

L’objectif est triple pour les maraîchers :

  • Économique  : il s’agit d’une part de baisser les charges de production tout en assurant un bon rendement afin de garantir la viabilité de l’exploitation et un revenu décent. Et d’autre part de restaurer ses sols sur plusieurs années afin d’obtenir un réel capital supplémentaire.
  • Social  : le MSV permet de baisser la charge et le temps de travail du maraîcher et donc améliorer ses conditions de travail et sa qualité de vie.
  • Environnemental  : un sol vivant étant à la base de toute démarche agroécologique de défense de l’environnement à des fins de production optimale.

Techniquement, comment cela se passe ?

  • Une étape de transition nécessaire

Passer en maraîchage sur sol vivant nécessite une étape de transition qui dure 4 à 5 ans avant de pouvoir profiter pleinement d’un sol vivant. Au préalable, un diagnostic doit être effectué afin de connaître l’état de ses sols. L’itinéraire technique de la transition est à adapter en fonction des résultats de ce diagnostic et du type de parcelle sur lequel on souhaite implanter un système « maraîchage sur sol vivant ». Par exemple, sur un sol anciennement travaillé qui présente une semelle de labour, il faut d’abord décompacter son sol en le travaillant avant de passer en « maraîchage sur sol vivant ». Si la vie du sol est quasiment inexistante, apporter en surface une couverture de MO ne sera pas efficace, il faudra au préalable incorporer au sol des matières fortement carbonées. Sur une prairie, la transition est encore différente, il faut la bâcher pour empêcher les plantes prairiales de faire de la photosynthèse et pouvoir ensuite planter dans un sol propre.
L’étape de transition est primordiale pour la réussite de l’implantation du système « maraîchage sur sol vivant ». Il est important de connaitre l’état de son système avant d’entamer sa transition puis de vérifier que la vie du sol soit active avant de mettre en place strictement les pratiques du « maraîchage sur sol vivant ».

  • Une fois le système installé

Lorsque la période de transition est achevée, l’agriculteur peut profiter d’un sol vivant pour produire ses légumes. Sa charge de travail et les intrants de cultures diminuent : les pratiques de maraîchage sur sol vivant allègent certaines étapes de la gestion technique de la ferme.

Les techniques de plantation demandent une adaptation des outils classiques afin d’ouvrir le paillage sur la ligne de plantation par exemple. Le désherbage est géré grâce à un couvert permanent du sol par bâchage, paillage ou mulch. La fertilité du sol est assurée par l’apport de MO. Chaque année, le maraîcher doit épandre 20 à 25 tonnes par hectare de MO afin d’entretenir son système. Cet apport compense la partie d’humus qui a été minéralisée par la vie du sol et qui a permis la nutrition des cultures. L’azote n’est donc plus l’élément limitant du système. Les sols sont auto-fertiles, les apports azotés sont remplacés par des apports carbonés. Les maladies et ravageurs sont moins présents également du fait d’un sol moins stressé et plus diversifié.

Néanmoins, la limace et le campagnol par exemple restent des problématiques réelles pour les maraîchers. Les ravageurs hors sol sont gérés avec des filets anti-insectes. La gestion de l’irrigation dépend des cultures mais surtout des conditions climatiques. Si elle peut être diminuée dans certaines régions où les pluies sont fréquentes, sous des climats plus secs et instables elle est nécessaire pour l’ensemble des cultures et pour la décomposition du couvert.

Chaque type de cultures demandent un itinéraire technique spécifique. Les pratiques MSV ne sont pas généralisées ou automatisées. Chaque maraîcher explore et teste ses pratiques techniques afin de les perfectionner et de les faire correspondre au mieux à leurs conditions pédoclimatiques.

Les systèmes maraîchage sur sol vivant sont encore en expérimentation et en développement afin de parfaire la technique. Le réseau national Maraîchage sur sol vivant travaille ainsi depuis sa création à développer les itinéraires techniques de cette pratique afin de pouvoir les adapter à tout maraîcher. Ils diffusent leurs essais et leurs résultats et proposent des formations au plus grand nombre pour continuer d’étendre le « maraîchage sur sol vivant » sur le territoire national et assurer la réussite des transitions vers le « maraîchage sur sol vivant ». Si le groupe local Normandie Île-de-France est très actif au niveau du « maraîchage sur sol vivant » et maîtrise bien ses pratiques, du travail reste encore à faire afin de les adapter aux autres conditions pédoclimatiques de France et de développer le réseau dans l’intégralité des régions.

SOURCES :