Rencontre sur l’agroforesterie sur la Métropole

Le 16 décembre 2020, une trentaine de personnes se sont retrouvées à Quincieux pour parler d’agroforesterie. Parmi eux, une quinzaine d’agriculteurs.rices, des porteurs de projet en installation, des techniciens, conseillers et membres de collectivités…
Tous les documents utiles diffusés en salle sont à la fin de l’article !

C’est avec beaucoup d’attention et d’intérêt que nous avons suivi en début d’après-midi la présentation du conseiller agroforesterie de la société AGROOF, bureau d’étude créé en 2000 spécialisé dans les pratiques agroforestières.

Nous avons commencé par préciser les définitions, issues de la PAC, qui distingue les haies de l’agroforesterie :

  • Agroforesterie = « Les parcelles présentant des arbres d’essences forestières, dans la limite de 100 arbres/ha (arbres isolés ou alignés) ».
  • Haie = « Unité linéaire de végétation continue d’arbustes, et, le cas échéant, d’arbres, d’une largeur maximale de 10 mètres et ne présentant pas de discontinuité supérieure à 5m de long. Elle peut être située en bordures de champ, dans le champ ou en bordures de cours d’eau ».

Puis nous nous sommes intéressés aux principes de l’agroforesterie, aux avantages qu’elle présente pour les cultures ou les animaux, et aux différentes techniques mobilisables.
Les nombreux retours d’expériences et témoignages apportés par l’intervenant sont venus étayer ses propos et permettre de voir des applications concrètes des principes de l’agroforesterie, selon différents contextes : types de cultures, de systèmes agricoles, d’élevages etc.
Les échanges en salle ont été nombreux, le sujet suscitant des questions chez les porteurs de projet.

Quelques points à retenir :

• Orientation à privilégier pour les alignements d’arbres en agroforesterie : Nord-Sud.
• Densité moyenne : 50 arbres/ha
• On peut tailler les arbres selon différentes formes, selon le besoin de lumière des cultures, ou la valorisation du bois souhaitée : arbres en cépée, arbres émondés, arbres de haut jet, arbres têtards (très productifs).
• Part des parcelles agroforestières à viser dans une exploitation céréalière : 5 ha
— > Pas la peine de planter sur toute l’exploitation !
— > Commencer par planter des haies brise-vent, avant de planter de l’arbre intra-parcellaire

Pour la valorisation du bois, certaines CUMA s’équipent de scieries mobiles.

Rendement agricole en agroforesterie :

  • Les arbres en période de croissance n’ont pas d’impact sur le rendement. Au bout de 20 ans, lorsque la canopée s’est développée, on observe une baisse de rendement d’environ 20%.
  • Sous les arbres, il y a moins de lumière donc moins de fleurs, donc moins de grains par épi : baisse de rendement ;
  • Mais le TMG augmente sous les arbres, ainsi que le taux de protéines car il y a moins de stress hydrique sous les arbres lors de la période de remplissage des grains ;
  • Possibilité de faire évoluer les parcelles agroforestières vers plus de cultures d’hiver, et moins de cultures de printemps ;
  • Les prairies agroforestières produisent moins d’herbe, mais la pousse estivale est supérieure ;

Intérêt des arbres pour les cultures  :

  • Apport d’azote : environ 40 unités d’azote / an
  • Augmentation de la réserve utile du sol
  • Fourrage pour les animaux  : la feuille de frêne est plus riche en azote que la luzerne par exemple
  • Mycorhization  : les racines pérennes des arbres favorisent l’installation des champignons et la mycorhization, qui apporte des nutriments aux plantes
  • Effet tampon des arbres sur la température : régulation des températures extrêmes
  • Apport de matière organique et régénération du sol  : ce sont les arbres pionniers qui font les sols (bouleau, peuplier, saule…)

Point sur les haies brise-vent :

  • Une haie brise-vent se compose de 3 strates pour freiner le vent ; les grands arbres sont à espacer de 4 mètres, et entre ces arbres, placer des petits arbres et des arbustes tous les mètres.
  • Une haie bien constituée par ces 3 hauteurs de végétation protège sur 7 à 10 fois de sa longueur. Par exemple : une haie de 10 mètres de haut protège sur 100 mètres la culture derrière
  • Augmentation des rendements permise grâce à l’effet brise-vent qui :
    — > empêche la dérive de l’irrigation,
    — > limite l’assèchement des cultures par le vent,
    — > permet de traiter n’importe quand car moins de vent.

Agroforesterie et biodiversité :
On n’observe pas forcément plus de carabes dans les parcelles agroforestières, mais une plus grande diversité d’auxiliaires de culture.
Les zones de lisière sont toujours très riches en biodiversité.

Pour favoriser la biodiversité, il faut lui fournir le gite et le couvert  : des abris d’hibernation avec des essences à feuilles persistantes, de la nourriture précoce (noisetier, saule blanc…), intermédiaire (sureau, viorne lantane…) et tardive (viorne tin, nerprun alaterne…). On peut également les attirer avec des proies de substitution, et ainsi réguler la présence des ravageurs dans les cultures : exemple du sureau qui attire les pucerons, qui sont mangés par les coccinelles.
Il est aussi nécessaire d’implanter une bande enherbée sur la ligne d’arbres. On peut choisir d’implanter une bande fleurie au milieu des arbres sur la parcelle, mais il y a un risque de salissement : on préférera des graminées couvrantes.

Entretien des haies :

  • Éviter de tailler tous les ans en hauteur, sinon il n’y a pas de fleurs ni de fruits
  • Pour une gestion durable des haies, il faut :
    — > Multiplier les strates : une haie vieille ne contient plus que des arbres hauts, qui subissent la sécheresse et finissent par mourir.
    — > « Mettre en lumière », c’est-à-dire couper des segments assez grands (30 à 50 mètres de long) pour éviter que les arbres voisins ne colonisent l’espace et empêchent la repousse à l’endroit de la coupe.
    — > Rajeunir ponctuellement
  • Attention aux accidents ! utiliser du matériel adéquat, comme un grappin coupeur.

Agroforesterie selon le système agricole :

  • En maraichage : privilégier des arbres forestiers plutôt que fruitiers, car les arbres fruitiers demandent plus de travail d’entretien et de technique.
    Tous les outils pour concevoir un verger-maraicher sur ce site : https://www.grab.fr/le-projet-smart/
  • En élevage  : l’association des animaux et des arbres fruitiers fait souvent un bon mariage —> ombre pour les animaux ; nourriture avec les arbres fourragers (frêne, murier) ; limitation des maladies dans les prés-vergers ; image de marque …
    L’arbre est essentiel dans le parcours des volailles : amélioration des performances zootechniques, limitation des prédateurs, réduction des risques de maladies, intégration paysagère…
  • En céréales  :
    — > Exemple d’aménagement : des arbres d’avenir (pour le bois d’œuvre) tous les 10 mètres, avec des arbres à croissance rapide entre chaque
    — > Essences possibles : peuplier ; robinier faux acacia (en milieu de parcelle pour éviter envahissement) ; fruitiers forestiers (cormier, sorbier, merisier), qui sont des essences intéressantes pour les oiseaux et colorées (intérêt en menuiserie) ; noyer (bon prix de vente)

La présence de techniciens spécialistes de l’arbre champêtre et des haies bocagères dans la salle, de la Fédération des Chasseurs du Rhône et de la Métropole, et d’ARTHROPOLOGIA, a permis d’apporter des compléments d’information et d’autres retours d’expérience.

ARTHROPOLOGIA a notamment pu présenter les rôles des haies dans l’accueil de biodiversité, et l’intérêt de cette biodiversité pour la production agricole.
Pour aider les agriculteurs, l’association réalise des diagnostics d’environnement de parcelles qui permettent de relever tous les éléments semi-naturels ou infrastructures agroécologiques sur les abords d’une parcelle, et de proposer des améliorations en augmentant leur quantité, leur qualité ou leur connexion.
Afin de bénéficier des services de régulation fournis par la biodiversité (limitation des ravageurs et maladies, régulation du climat), il est nécessaire de réserver au moins 1/5 de sa SAU à des espaces plus naturels. Sur chaque parcelle par exemple, consacrer au minimum 20 % de l’occupation du sol à des SIE (haies, bandes enherbées, friche, jachère, prairie naturelle, etc).

Vous pouvez retrouver ici des vidéos réalisées par l’association pour vous permettre d’accueillir le vivant dans les champs : https://www.agri-lyonnaise.top/du-vivant-dans-les-champs

Visite de terrain

L’après-midi s’est poursuivie sur le terrain, sur une parcelle communale ayant accueilli un projet de plantation de 250 arbres quelques semaines plus tôt, en partenariat avec la Fédération des Chasseurs du Rhône et de la Métropole de Lyon. Ce site présentait la particularité d’être bordé par une haie déjà ancienne de plusieurs années, plantée par un agriculteur de la commune le long de sa parcelle.
Les intervenants ont ainsi pu répondre aux nombreuses questions des participants sur les techniques pour réussir les plantations, l’entretien des haies et des jeunes arbres, l’intérêt des haies spontanées, la valorisation du bois etc.

Quelques points clé à ne pas négliger pour réussir les plantations :

  • Décompacter le sol en fin d’été/début d’automne (sur sol sec) : si cela n’est pas fait, mieux vaut attendre l’année suivante pour planter !
  • Pas d’herbe sur 1 m² de sol autour de l’arbre pendant 3 ans !
  • Faire un trou droit à la pelle ; tarière possible dans un sol sableux mais pas argileux ;
  • Planter des jeunes arbres (d’un an) sans feuilles, à partir du 25 novembre
  • Mettre la protection autour de l’arbre dans la foulée de la plantation
  • Mulcher abondamment autour de l’arbre (sans oublier d’en mettre dans la gaine de protection) : le mulch (paille, feuilles mortes ou bois déchiqueté) est indispensable pour lutter contre la sécheresse et permettre la reprise des arbres !
  • Ne pas trop arroser les arbres pour les forcer à développer leurs racines en profondeur

Les haies spontanées présentent l’avantage de bien résister à la sécheresse, et de ne pas nécessiter d’investissements au départ : sur une parcelle peu exposée aux regards, il est possible de laisser une haie se développer spontanément en mettant une zone en défens sur 3 m de large avec des piquets en quinconce. Les oiseaux vont venir ensemencer la zone, et les cortèges floristiques vont se succéder pour donner place en 10 ans à une belle haie composée d’espèces diverses et bien adaptées aux conditions climatiques.

Chiffres clés pour la productivité d’une haie :

  • 500 m3 /km en 20 ans,
  • Moyenne de 25 m3/km /an

AGROOF bien insisté sur l’importance de commencer par planter des haies brise vent tout autour des parcelles avant d’implanter des arbres intra-parcellaire. L’agroforesterie commence par là !

Le Vice-Président en charge de l’agriculture à la Métropole de Lyon, Jérémy Camus, est passé dans l’après-midi rencontrer les participants, et présenter quelques éléments de la feuille de route du nouvel exécutif.

Les participants remercient les intervenants pour la richesse des échanges et la qualité de leurs interventions, ainsi que la commune de Quincieux à travers la personne de Cyril Fiard, qui a permis à cette rencontre de se tenir dans d’excellentes conditions !

Pour aller plus loin et vous faire accompagner dans vos projets d’agroforesterie ou de haies sur le territoire, vous pouvez contacter :

  • AGROOOF, Antoine Marin : marin@agroof.net
  • ARHTROPOLOGIA, Solène Soulas : ssoulas@arthropologia.org
  • La Fédération des Chasseurs du Rhône et de la Métropole de Lyon, Jérôme Berruyer : j.berruyer@fdc69.com

N’hésitez pas à faire remonter vos idées de projets pour lesquelles vous souhaitez un accompagnement technique ou financier !

Guide de la gestion durable des haies (AFAC) :

https://afac-agroforesteries.fr/gestion-durable-des-haies-guide-de-preconisations/
Petit guide de la haie spontanée (ARTHROPOLOGIA) :

Présentation commentée par AGROOF :

Présentation commentée par ARTHROPOLOGIA :