Agroécologie & Elevage, plus qu’un concept
L’agroécologie est l’étude et la mobilisation des processus écologiques naturels dans l’acte de production agricole. Elle s’intéresse notamment aux interactions entre la flore (plantes, micro-organismes) et la faune (animaux et humains) dans leur environnement. L’agroécologie vise ainsi la création d’exploitations agricoles durables, résilientes et productives.
L’élevage en agroécologie cherche à utiliser ces processus naturels et à mobiliser des ressources locales plutôt que des intrants chimiques et des aliments importés pour assurer la production, tout en limitant l’empreinte environnementale des troupeaux.
Dans ce contexte, les adaptations en matière de système d’élevage sont nécessaires pour obtenir des animaux à la fois productifs et adaptés à un éventail de contextes locaux.
5 principes pour le développement d’alternatives agroécologiques dans les productions animales
En se basant sur les travaux de Miguel Altieri (Agroecology : The science of Sustainable Agriculture, 2nd ed. paru en 1995), l’INRA (Institut National de la Recherche Agronomique) développe 5 grands principes de bases pour l’élevage en agroécologie :
1. Gérer la santé animale en l’intégrant à une gestion globale de l’exploitation. Il s’agit ici d’une combinaison de trois facteurs :
• Le choix d’une ou de plusieurs espèces ou races adaptées au milieu dans lequel se trouve l’agriculteur.
• La réduction du stress produit par le surpeuplement, la taille excessive des troupeaux et l’incapacité pour les animaux à adopter des comportements naturels. Cela doit limiter l’apparition de maladies par la mobilisation des défenses immunitaires naturelles des animaux.
• La réduction de l’usage de médicaments et d’antibiotiques afin de limiter la dispersion des résidus médicamenteux dans l’environnement et l’apparition de souches microbiennes résistantes.
Depuis 2011, la lutte contre l’antibiorésistance est devenue l’un de enjeux majeurs de l’élevage en termes de santé animale et de santé humaine. On parle d’une seule santé : ONE HEALTH. La mise en place du plan Ecoantibio 1 a contribué à la réduction de 39 % des antibiotiques en 6 ans, toutes filières animales confondues [plus de résultats : ici] . Le plan Encoantibio 2, lancé à sa suite en 2018 vise principalement à soutenir les efforts réalisés.
2. Réduire les intrants en optimisant les ressources alimentaires disponibles sur l’exploitation et réduire ainsi la dépendance de l’éleveur aux ressources externes. Le challenge ici étant de limiter la concurrence entre alimentation humaine et animale en valorisant en priorité les zones herbagères naturelles (prairies permanentes, parcours, estives…) grâce aux ruminants.
Sur le thème du développement de l’élevage en agroécologie et de l’élevage autonome en agriculture de conservation des sols, vous pouvez retrouvez la présentation de Konrad Schreiber d’octobre 2019 [ICI]
3. Réduire la pollution et transformer les effluents animaux en ressources supplémentaires : amendements et/ou production énergétique par méthanisation.
4. Renforcer la résilience grâce au maintien d’une diversité au sein des troupeaux et des cultures. Cela permettra ainsi à l’exploitation de s’adapter aux perturbations et aux aléas externes.
5. Préserver la diversité biologique
Zoom sur le maintien d’une biodiversité pour une production économe et autonome
L’alimentation des animaux d’élevage reste souvent le premier poste de dépense financière et de temps de travail sur l’exploitation. Mais elle est aussi la garante de la pérennité de l’exploitation lorsque les surfaces utilisées maintiennent la biodiversité locale (polyculture, haies, zones humides, bandes enherbées, etc.) et rendent l’exploitation plus résiliente face aux aléas.
Une démarche d’élevage agroécologique appelle donc une adaptation du système d’élevage aux opportunités et aux contraintes locales des parcelles agricoles à disposition.
La standardisation des animaux et des conditions d’élevage semble donc contradictoire avec le paradigme agroécologique où l’élevage doit s’adapter au milieu. En système d’élevage agroécologique n’existe donc pas un seul type d’animal, mais des animaux aux profils variés qui répondent aux attentes souhaitées dans un contexte donné.
L’élevage possède alors un atout supplémentaire : celui de préserver la diversité entre les espèces et races animalières pour disposer de nombreuses options d’adaptation aux environnements et contextes de production.
Une meilleure assimilation par les agriculteurs et leurs accompagnants techniques des ressources génétiques et des outils de sélection disponibles est nécessaire à cette fin.
Cette montée en compétences permettra par la suite une meilleure gestion des ressources alimentaires disponibles et des flux d’éléments nutritifs dans l’élevage, avec des effets bénéfiques sur l’environnement.
Le levier de la qualité des sols est également fondamental dans l’approche agroécologique de l’élevage.
En effet, des sols en meilleure santé biologique seront plus productifs et à même de supporter les besoins alimentaires de plus d’animaux. L’amélioration de la qualité biologique des sols passe souvent par une amélioration du taux de matière organique et de l’équilibre chimique (pH, CEC).
Enfin, le retour de l’élevage dans les exploitations spécialisées dans les productions végétales est envisageable dans une approche agroécologique où l’on cherche à recycler les nutriments sur la ferme. Cette réintroduction peut s’envisager d’abord à la marge par la valorisation des couverts végétaux d’interculture et au-delà par l’intégration de cultures fourragères intercalaires bi- ou trisannuelles entre des cultures céréalières ou oléo-protéagineuses.